Les Émirats arabes unis occupent une place unique sur le globe, bénéficiant d'un ensoleillement généreux mais confrontés aux réalités d'un climat aride, de terres cultivables limitées et d'une pénurie d'eau douce. Honnêtement, c'est un environnement difficile pour l'agriculture. Cela signifie que les EAU importent une part énorme – environ 85-90 % – de ce que leur population consomme. Cette forte dépendance rend la nation vulnérable aux perturbations de la chaîne d'approvisionnement mondiale et aux fluctuations imprévisibles des prix, une réalité mise en évidence lors d'événements comme la pandémie de COVID-19. Pour s'attaquer de front à ce problème, les EAU ont lancé leur Stratégie nationale de sécurité alimentaire 2051 en novembre 2018. L'idée principale ? S'assurer que chaque personne aux EAU ait accès à une nourriture saine, suffisante, nutritive et abordable, quoi qu'il arrive dans le monde, même en cas d'urgence. La grande vision : Viser la première place à l'Indice mondial de sécurité alimentaire
Alors, quel est l'objectif ultime ? C'est ambitieux, c'est le moins qu'on puisse dire. Les EAU ne visent pas seulement à améliorer leur situation alimentaire ; ils veulent devenir un pôle mondial de premier plan pour la sécurité alimentaire axée sur l'innovation. La stratégie fixe un objectif clair : atteindre la première place à l'Indice mondial de sécurité alimentaire (GFSI) d'ici 2051. Maintenant, que mesure réellement le GFSI ? Il évalue l'accessibilité financière, la disponibilité, la sécurité et la qualité de la nourriture dans 113 pays, en utilisant 68 indicateurs différents, et en tenant même compte des ressources naturelles et de la résilience. Viser la première place montre à quel point les EAU prennent au sérieux la sécurisation de leur avenir alimentaire. Piliers fondamentaux : Construire un système alimentaire résilient et durable
Comment les EAU comptent-ils réaliser cette grande vision ? La stratégie repose sur plusieurs piliers clés conçus pour bâtir un système alimentaire solide et durable. Il s'agit de créer un dispositif national qui soutient la production alimentaire durable, tire le meilleur parti des technologies modernes et renforce les capacités locales. Premièrement, l'amélioration de la production alimentaire locale. C'est un axe majeur, visant à augmenter sérieusement la quantité d'aliments cultivés ici même, aux EAU. L'objectif comprend une augmentation de 15 % de la production d'aliments stratégiques et une hausse du rendement global de 30 % grâce à la technologie. Comment ? En adoptant des techniques comme l'agriculture en environnement contrôlé (CEA), l'hydroponie, l'agriculture verticale et la pisciculture (aquaculture). Il y a aussi une promotion de l'agriculture biologique, visant une augmentation annuelle de 5 % des terres qui y sont consacrées, et la définition d'un « panier alimentaire » national de 18 produits clés pour orienter ces efforts. L'objectif est une agriculture durable qui augmente la production tout en protégeant les écosystèmes. Ensuite, il y a la diversification des sources d'importation. Soyons réalistes, les importations resteront nécessaires, mais la stratégie vise à réduire les risques en ne dépendant pas trop de quelques fournisseurs seulement. Le plan est de sécuriser trois à cinq sources différentes pour les principaux types d'aliments et d'obtenir 67 % des importations de ces alternatives ciblées. Cela implique de nouer des partenariats internationaux, de renforcer la logistique et même d'investir à l'étranger pour assurer un flux constant de nourriture, même en temps de crise. Enfin, la promotion de la durabilité et la réduction du gaspillage sont intégrées dans tout le plan. Cela signifie utiliser des technologies économes en ressources comme l'hydroponie et les fermes verticales. Il y a un objectif spécifique de réduire les pertes et le gaspillage alimentaires de 15 %. Des initiatives comme 'ne'ma', l'Initiative nationale de réduction des pertes et du gaspillage alimentaires, rassemblent tout le monde pour s'attaquer à ce problème. La stratégie vise également à améliorer la nutrition, en ciblant une réduction de 15 % des éléments alimentaires malsains, et à renforcer la sécurité sanitaire des aliments, en visant 35 % d'incidents en moins. Tout cela s'inscrit dans les objectifs plus larges des EAU, comme l'initiative Net Zero by 2050. Moteurs de la stratégie : Initiatives clés et innovation
Bon, on a les piliers, mais comment tout ça se met en place ? La stratégie comprend 38 initiatives clés guidées par cinq orientations stratégiques, avec un fort accent sur l'innovation et l'implication du secteur privé. La promotion de l'innovation agricole et de la R&D est absolument centrale. Les EAU considèrent l'innovation comme la clé pour devenir ce pôle de premier plan mondial. Des investissements gouvernementaux importants sont consacrés à la recherche et au développement agricoles, à la création de centres de recherche et à la création de synergies entre le gouvernement, les entreprises privées et les universités. La recherche se concentre sur des domaines critiques comme la génétique, les impacts du changement climatique, l'aquaculture (en particulier les espèces de poissons clés), le recyclage des déchets agricoles, les aliments alternatifs et l'utilisation de technologies comme les TIC dans l'agriculture. Un Agenda national de R&D pour la sécurité alimentaire dédié guide ces efforts. Pense à des projets comme le FoodTech Challenge, une compétition mondiale suscitant de nouvelles idées, et l'immense Food Tech Valley à Dubaï, conçue comme un terrain d'essai pour des solutions agricoles de pointe. L'encouragement de la participation du secteur privé est tout aussi vital. La stratégie reconnaît que les entreprises ont un rôle énorme à jouer sur l'ensemble de la chaîne alimentaire. Le gouvernement s'efforce de créer un environnement où les entreprises privées peuvent prospérer et innover aux côtés des institutions publiques. Cela signifie favoriser les partenariats pour la R&D, encourager l'investissement (comme via l'initiative AIM for Climate), et impliquer les entreprises dans l'approvisionnement, le stockage, la logistique et la réduction des déchets. De grands acteurs comme ADQ et Al Ghurair sont déjà impliqués, et des partenariats public-privé sont à l'étude. Des initiatives comme le FoodTech Challenge offrent des incitations aux startups, et Food Tech Valley recherche activement des investissements de la part d'acteurs mondiaux. On parle même de rendre le crédit plus accessible aux entreprises du secteur alimentaire. Le Dialogue national pour la sécurité alimentaire veille à ce que tout le monde discute et travaille ensemble. Mettons en lumière quelques programmes et projets majeurs :
Food Tech Valley (Dubaï) : Cette cité agrotechnologique soutenue par le gouvernement vise à être un pôle mondial, intégrant la R&D, la technologie et les affaires pour construire un écosystème alimentaire résilient. Un projet phare est la « GigaFarm », destinée à recycler les déchets et à cultiver des milliards de plantes en utilisant une agriculture verticale avancée. ne'ma : L'initiative nationale dédiée à la réduction des pertes et du gaspillage alimentaires, visant à les réduire de moitié d'ici 2030. FoodTech Challenge : Cette compétition mondiale qui encourage les solutions innovantes en matière de sécurité alimentaire. AIM for Climate : Le partenariat EAU-États-Unis qui stimule l'investissement dans l'agriculture intelligente face au climat. Emirates Food Security Council : L'organisme qui supervise l'ensemble de la stratégie, veillant à ce que tout le monde travaille ensemble. National Farm Sustainability Initiative : Axée sur l'incitation des entités gouvernementales à acheter davantage de produits cultivés localement, visant 100 % d'ici 2030. Investissement dans l'aquaculture : R&D axée sur l'élevage d'espèces de poissons locales clés pour renforcer la sécurité des produits de la mer. La route à suivre : Jalons, objectifs et progrès
Ce n'est pas juste une vague liste de souhaits ; la stratégie a une feuille de route claire avec des jalons en cours de route. À plus court terme, d'ici environ 2030, les EAU visent à entrer dans le Top 10 de l'Indice mondial de sécurité alimentaire (GFSI) dans le cadre de la vision 'We the UAE 2031'. D'autres objectifs à court terme incluent d'atteindre 100 % d'approvisionnement gouvernemental en produits locaux d'ici 2030, de réduire de moitié le gaspillage alimentaire d'ici 2030, d'augmenter les investissements via AIM for Climate d'ici 2025, et de rendre la GigaFarm opérationnelle en 2025. En regardant plus loin vers 2051, la vision reste ultra-ciblée : atteindre ce classement n°1 au GFSI et devenir le premier pôle mondial pour la sécurité alimentaire axée sur l'innovation. On mentionne même un objectif d'atteindre 50 % de production alimentaire nationale d'ici là. Ce plan à long terme s'inscrit parfaitement dans le cadre plus large du UAE Centennial Plan 2071. Alors, où en sont les progrès concernant ce classement GFSI ? Eh bien, il y a eu une amélioration significative – les EAU ont gagné 12 places entre 2021 et 2022/2023, atteignant un score de 75,2. C'est un grand bond par rapport à la 31e place en 2018, bien que l'objectif du Top 10 soit encore en cours de réalisation. Les progrès sont suivis, et l'Emirates Food Security Council fait avancer les choses. Collaboration mondiale : Partenariats pour la sécurité alimentaire
Les EAU comprennent que la sécurité alimentaire n'est pas seulement un problème local ; c'est un défi mondial qui nécessite un travail d'équipe. C'est pourquoi la construction de partenariats internationaux solides est un élément clé de la stratégie. Un partenaire majeur est l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Les EAU collaborent avec la FAO depuis des décennies, et ce partenariat fournit un soutien technique à la stratégie, couvrant tout, de la R&D à la gestion des pêches. Les EAU accueillent même le bureau sous-régional de la FAO et mettent en place le premier Centre d'excellence régional de la FAO pour la transformation des systèmes alimentaires. La collaboration ne s'arrête pas là. Les EAU travaillent avec le Programme alimentaire mondial (PAM) sur l'innovation, le Centre international de recherche agricole dans les zones arides (ICARDA) sur la recherche en agriculture en zones arides, et le Centre international d'agriculture biosaline (ICBA), qui est basé ici même aux EAU et se concentre sur l'agriculture en conditions salines. Les EAU sont également actifs dans le partage des connaissances, en accueillant des événements comme les MENA AgriFood Innovation Days et en participant à des forums mondiaux comme la COP28 pour partager leurs expériences et apprendre des autres. Les accords bilatéraux, comme l'initiative AIM for Climate avec les États-Unis, et les partenariats avec des entreprises internationales sont également cruciaux pour diversifier le commerce et attirer de nouvelles technologies. Implications stratégiques : Ce que cela signifie pour les parties prenantes
Que signifie cette stratégie ambitieuse pour les différents groupes ? Pour les décideurs politiques, elle fournit une feuille de route claire et des outils comme la promotion de la R&D, l'attraction des investissements et l'établissement de réglementations. Suivre les progrès et assurer la collaboration entre les différents niveaux de gouvernement est essentiel. Aligner la sécurité alimentaire avec les stratégies climatiques et hydriques est également vital. Pour les entreprises et les investisseurs, cette stratégie est synonyme d'opportunités. Pense à l'agritech, aux méthodes d'agriculture durable comme l'hydroponie et les fermes verticales, à la transformation des aliments, à la logistique – le potentiel est énorme. Des programmes gouvernementaux comme Food Tech Valley et le FoodTech Challenge recherchent activement des partenaires privés et des investisseurs. Il y a une demande pour des technologies qui économisent l'eau, gèrent le climat et réduisent les déchets. La promotion de la production locale et la diversification des importations ouvrent des portes aux fournisseurs, aux prestataires de technologies et aux entreprises de logistique. Les partenariats public-privé offrent des moyens de s'impliquer dans des projets majeurs. Et pour les chercheurs ? L'accent mis sur la R&D signifie de nombreuses opportunités de financement et de collaboration, en travaillant avec des organismes gouvernementaux, des organisations internationales comme la FAO et l'ICARDA, et des partenaires industriels. Les domaines de recherche clés comprennent le développement de cultures résilientes au climat, les techniques d'économie d'eau, l'aquaculture, les protéines alternatives, la valorisation des déchets et l'utilisation d'outils numériques comme l'IA dans l'agriculture. Des pôles comme Food Tech Valley visent à attirer les meilleurs talents de la recherche. C'est une période passionnante pour l'innovation alimentaire aux EAU.